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MY HARLEY'STORY

 

Le camp militaire US de Chinon : la révélation


Le camp-dépôt US de Chinon - Saint-Benoît-la-Forêt fonctionna entre 1951 et 1967, jusqu'à ce que la France quitte l'OTAN. A l'exception de l'hôpital, transformé aujourd'hui en maison de retraite médicalisée, tout a été rasé. Il ne reste plus que des vestiges épars, totalement recouverts par la végétation > En savoir plus

C'était en 1959, je crois, par une belle matinée ensoleillée. Je n'avais pas dix ans...

J'étais pensionnaire d'un orphelinat religieux tenu par des soeurs près de Tours. Un jour, ceux qui comme moi passaient leur week-end au pensionnat (sept ou huit), eurent droit à une sortie magique. Nous fûment amenés à une quarantaine de kilomètres de là, en pleine forêt, au camp américain de Chinon. Le plus grand d'Europe. Une vraie ville résidentielle, avec ses sages allées et routes géométriques à perte de vue, bordées de signalisations, et son house-club où nous avons fini une visite déjà passionnante, peuplée d'uniformes de MP, d'armes lourdes, canons et engins divers : tanks, bulldozers, GMC, pickup, jeep, sidecars et servi-cars.

Là, découverte stupéfiante d'un bowling de saloon et d'un juke-box-scopitone jouant de fabuleux rythmes inconnus alors, Jazz et Rock and Roll. Nous eûment droit chacun à du Coca-cola, des barres de chocolat et du chewing-gum à volonté. Tout était inédit, moderne, abondant et coloré et respirait la joie de vivre. Un choc avec la pénurie et la grisaille française d'après-guerre, sans compter l'orphelinat. Nous en perdions la tête. Puis nous sommes sortis. Pour moi, le meilleur était à venir..

Devant nous, venant d'arriver, une moto dont le moteur ronronnait doucement. On nous dit que c'était une Harley Davidson. Elle était fabuleusement rutilante, rouge et crème, brillant de tous ses feux et chromes, avec un pare-brise sur lequel figurait un aigle argenté aux ailes déployées. En un clin d'oeil nous étions tous attroupés autour, fascinés comme devant une apparition divine, au grand dam des soeurs.

Je compris aux signes qu'il faisait que le G.I. qui la pilotait nous invitait à monter. J'étais juste là contre lui à lui tenir la manche et il me hissa tout debout pour m'assoir devant lui sur la belle galette de cuir blanc, bordée de chromes, qui servait de selle. J'écartais les bras vers le guidon. Je senti un frisson me parcourir. J'entendis alors une pétarade merveilleuse que je n'ai jamais oubliée, la moto démarra et fit un petit cercle par la droite. Je crus tomber tellement la moto penchait mais elle se redressa aussi vite, en même temps qu'elle stoppait là où nous nous trouvions l'instant d'avant. C'était déjà fini. Le G.I. me déposa avec un grand éclat de rire, baragouinant quelque chose avec cet accent inimitable.

Tout le monde riait sauf les soeurs médusées. Je fus le seul bénéficiaire de cette chevauchée éclair qui détermina à jamais ma passion pour Harley. Je ne sais pas de quel modèle il s'agissait. Une Panhead ou une Duo-Glide ? Peu importe. J'ai vécu ce jour-là le paradis sur terre. Nous n'avions rien de semblable ailleurs en France. J'y suis retourné cinq ans après, rien que pour ça, avec la même émotion.

Rien que du Kaki et du Harley

En 1971, lors de mon service militaire, en tant qu'officier de réserve, je commandais un peloton d'instruction où j'encadrais la formation des conducteurs et la délivrance des permis, ainsi que leur validation pour le permis civil. J'obtins moi-même tous mes permis militaires, y compris moto que je passais sur une Terrot. Il me servira ensuite légalement durant plus de 25 ans sous pretexte de mes activités dans la réserve. Sur le coup, je ne l'ai pas validé, par scrupules, et j'ai du repasser le permis + tard sans jamais cesser de piloter. Après le service, je débute avec une vieille Triumph type Bonneville. A l'époque, ni limitation de vitesse, ni casque... ni trafic !

Un pote officier m'intègre alors dans une bande de 5 copains acceptant des motos étrangères autres que BMW. Il y a quatre Harley, des récup de Chinon. On parle et pense Harley, on va aux premiers rassemblements bikers au Mans, Vincennes et Maisons-Lafitte. Notre club informel grossit peu à peu. On joue aux bad-boys à la CB lors de ballades et de rallyes, avides de grands espaces. On redécouvre L'équipée sauvage et Easy rider dans une petite salle dédiée à la culture US et on se gave de rock. Je découvre la country. On fait aussi des ateliers mécanique, révélateurs de mon incompétence en la matière. Dans les années 1980, un autre copain officier me prête en permence sa vieille Panhead kaki et parfois sa nlle HD Sportster 1977, la première à démarrage électrique. Le pied !

Quelques années plus tard, finances à sec, je n'ai plus de moto. perso. Entre temps, je me suis lié d'amitié, lors d'un exercice commun à Paris, avec Jeason, un colonel américain marié à une française dont je découvre qu'il était jadis affecté au camp de Chinon ! Lorsqu'il part en mission à l'ambassade US en Israël Jeason me confie sa MT 500 (photo), une Harley militaire singulière (ex-Amstrong), que j'ai le droit de piloter au civil parce qu'elle est homologuée, sur les papiers dont je dispose, en 400 cm3, ce qui est compatible avec la législation de l'époque. Je vais l'user. Je suis de presque tous les déplacements Harley et ça commence à prendre de l'ampleur. À Paris je participe à une virée avec Johnny et son club Harley.

La moto finira par rendre l'âme après de bons et loyaux services. La législation une nouvelle fois modifiée, je ne peux m'offrir qu'une vieille Honda, tout en continuant une vie parallèle d'Harléiste avec les copains et le HOG. Jusqu'à ce que le chômage, une longue reconversion et un second divorce me contraignent dans les années 1990 à réduire encore plus mon train de vie. Plus de moto durant plus de 10 ans bien que je piloterai deux fois une HD Road King du coté de Poitiers. Expatrié à Lille, je perds de vue les potes d'antan, un peu par dépit. En attendant, je poursuis ma collection de motos miniatures Harley Davidson débutée avec une JDH Twin Cam militaire de 1928. Déjà une trentaine.

Jésus fait des miracles... un demi-siècle plus tard

En 1985 une connaissance fait d'urgence appel à moi qui, ayant entrepris de reprendre des études, terminait à peine une maîtrise de droit public à Tours. À l'époque je n'osais pas encore espérer devenir docteur, puis prof de fac.

Pris par les délais qu'il avait laissé passer, je lui rédige dans la nuit un référé administratif qui, par chance, aboutira, jugulant ainsi une catastrophe annoncée. Je lui rends aussi un service plus personnel et confidentiel, sans doute tout aussi important.

Jésus, qui préfère se faire appeler José, son second prénom, unique héritier d'une haute bourgeoisie portugaise fortunée, l'un des acteurs de la Révolution des oeillets, présentement consul, est appelé à des fonctions ministérielles dans son pays. Il veut me remercier, non en argent, mais en réalisant l'un de mes rêves. C'est ainsi que je deviens le destinataire d'une curieuse disposition d'un placement financier où une somme d'un montant convenu, correspondant exclusivement à l'achat neuf d'une motocyclette Harley Davidson de classe Touring, m'est réservée après un délai de 5 ans, conditionnée à cet achat pendant 30 ans et non transmissible à mes descendants.

Mais pour que le rêve devienne réalité, l'usage de mon permis militaire n'étant plus possible, il me faut obtenir le permis civil, ce que, pour des raisons de reconversion (donc manque de temps et d'argent), puis de problèmes de santé, je n'entrepris pas de faire. Du coup, en pratique, j'oubli presque ce cadeau somptueux. Entre temps Jésus rejoint le paradis.

Ma denière épouse Sylvie débloque la situation fin 2008 alors que mon état de santé souligne qu'il faut profiter du temps qui s'enfuit. Informée dès notre rencontre de cette histoire et lassée au fil des années de sentir mon désir d'Harley insatisfait, elle s'oblige à s'inscrire avec moi au permis moto pour me stimuler.

Prenant conscience simultanément qu'un magot oublié n'attend plus que moi, je découvre le trike Harley. Non seulement il est pilotable immédiatement avec le permis B mais surtout il correspond mieux à nos exigences de confort et de sécurité. C'est ainsi que, mobilisant ce pactole, complété de mes maigres économies, je deviens l'heureux propriétaire du summum de Harley, une Electra CVO récente, appelée à se muer en Trike EML, tout près de chez moi, à Bailleul, où se trouve par chance le seul transformateur de France. Entre temps, Sylvie et moi obtenons l'attestation 7h nécessaire pour la conduite d'un tricycle, tout en continuant à préparer doucement notre permis moto, le tout réussi du 1° coup. Dur à notre âge.

J'ai donc le top de Harley au moment de souffler mes 61 bougies, réalisant ainsi, comme par miracle, mon rêve de gosse... plus de 50 ans après. Merci Jésus !

Le paradis... mais à quel prix !

Ce petit bijou, transformation, nouvelle peinture et accessoires compris, m'a coûté une fortune ; le prix d'une petite Porsche ou de deux Mercedes classe A ! Une folie quant à mes seules possibilités personnelles, même couverte pour plus des 4/5° par le don de Jésus. Mais c'est aussi le prix du rêve, ainsi que celui de la sécurité nécessaire à notre âge et à mon état de santé.

Les trikes Harley n'était pas importés avant 2014. Mon trike résulte du montage du kit « Manhattan » EML sur ma moto d'origine qui garde néanmoins l'essentiel de ses caractéristiques. Seuls la partie cycle et carénage à l'arrière sont radicalement modifiés avec un aménagement des freins et de la direction avant. Le loock Harley est préservé, voire renforcé par l'originalité de l'engin.

La conduite est certes un peu différente d'un deux-roues. Elle s'apparente à une voiture au niveau stabilité quant au comportement sur les aspérités ou les parties glissantes de la route. On est cependant obligé de balancer le haut du corps pour accompagner les virages et tourner fortement le guidon pour forcer l'engin sous-vireur à ne pas quitter la bonne trajectoire, qu'il faut, par ailleurs, savoir choisir soigneusement pour ménager son confort. La conduite reste physique mais, excepté la relation malaisée avec la force centrifuge, les sensations sont clairement celles d'une moto classique en ligne droite. 

• Caractéristiques de l'Électra Glide Ultra Classic CVO de 2010 > ici

• Moto-Trike EML France - Duyme's motors à Bailleul (59) > ici

• Stage 7h Trike - Auto École Deburck à Bailleul (59) > ici

Maquette de mon cru du projet tel que je l'avai imaginé >

La transformation

mise en peinture du gardeboue avant



MA MOTO-TRIKE
HARLEY



 

 
Le trike est très lié à l'histoire d'Harley Davidson. Pour en savoir plus sur les trikes, un article sur WIKIPÉDIA dont je suis l'auteur > ici



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Adieu à ma CVO deux roues
L'album de mon trike
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